Montpellier : le monde de la recherche se mobilise pour réduire ses voyages en avion
25 Avr, 2021

À Montpellier une centaine de chercheuses et de chercheurs se sont engagés à limiter leurs déplacements en avion et, en particulier, à ne plus prendre la navette aérienne pour Paris.

Le signal est fort – lundi 12 avril, une tribune signée par une centaine de chercheuses et chercheurs est publiée dans le Midi Libre, le quotidien de la région montpelliéraine, dans laquelle ils promettent de limiter autant que possible leur utilisation de l’avion. En particulier, ils s’engagent à ne plus emprunter la ligne Montpellier-Paris, l’une des plus émettrices de CO2 en France. Une ligne qui, comme beaucoup d’autres, aurait été supprimée si la proposition de la Convention citoyenne pour le climat avait été reprise dans la loi Climat. Les citoyen·nes demandaient en effet la fin de tous les vols intérieurs pour lesquels existe une alternative satisfaisante en moins de quatre heures, ce qui est le cas pour la liaison TGV qui met la capitale héraultaise à moins de 3h30 de Paris. Mais le gouvernement en a décidé autrement en rabaissant la barre à 2h30.

Pour Stanislas Rigal, doctorant en biologie de la conservation à l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier et l’un des initiateurs de la tribune : « Les chercheurs doivent être en accord avec les travaux qu’ils mènent ». Un autre signataire, Pierre Ganault, docteur en écologie des sols, diplômé du Centre d’Écologie Fonctionnelle et Évolutive, estime pour sa part que « la communauté scientifique est bien consciente de l’urgence climatique depuis pas mal d’années, donc cette initiative est très bien reçue ». Tous les deux étaient présents lors d’une conférence de presse donnée devant la préfecture de l’Hérault – d’autres participant·es se trouvaient dans la fontaine, les pieds dans l’eau, pour symboliser la montée du niveau de la mer due au réchauffement climatique. En effet, selon certaines modélisations, si rien n’est fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, l’aéroport de Montpellier pourrait être submergé par les eaux d’ici 2100. Et, comme le soulignait Abigail Fallot, chercheuse au CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), la région méditerranéenne se réchauffe 20% plus rapidement que la moyenne mondiale.

D’autres initiatives ont vu le jour un peu partout en Europe. En France, le collectif Labos 1point5 réunit des membres du monde académique partageant un objectif commun : mieux comprendre et réduire l’impact des activités de recherche scientifique sur l’environnement, en particulier sur le climat. Des « ateliers d’écologie politique » ont également vu le jour. Depuis son lancement en 2018 à Toulouse, l’Atécopol participe à la construction d’une communauté pluridisciplinaire de scientifiques réfléchissant aux questions liées aux bouleversements écologiques. Il vient de publier un texte édifiant sur la bataille des chiffres autour du secteur aérien.

La tribune a généré beaucoup d’intérêt et de nombreuses retombées médiatiques. Elle a aussi suscité de vives réactions. Pour Emmanuel Brehmer, président du directoire de l’aéroport Montpellier-Méditerranée, « le bashing contre l’avion est injuste ». Et le Cercle Mozart, un sélect « groupe de réflexion » montpelliérain, a lancé une contre-tribune pour défendre l’aéroport. Mais les chercheuses et chercheurs ne comptent pas en rester là et, avec les groupes locaux de Greenpeace et d’Alternatiba qui ont activement soutenu l’initiative, ils réfléchissent déjà à la suite de leur mobilisation.

Photo J-B Truffault : conférence de presse des chercheurs, les pieds dans l’eau, devant la préfecture de l’Hérault.